La question de la chasse au gibier d'eau est un feuilleton estival récurrent et discret dont le dernier épisode est paru au Journal Officiel ce matin. Le suspense haletant du destin et des conditions d'usage des appelants est levé, et l'épilogue prend la forme d'un encadrement strict de la détention des sauvagines dont voici les principales modalités.
Vous pouvez consulter le texte intégral de cet arrêté en cliquant sur ce lien.
Trois modifications majeures, appliquables à partir du 1er Septembre 2006, sont apportées à la pratique habituelle de la détention des appelants :
- L'éjointage est désormais interdit et seule la taille réglière des rémiges permettra de conserver les appelants en captivité,
- Un registre officiel, relié et côté du nombre et des espèces détenues par chacun d'entre nous doit être tenu à jour et surtout, paraphé par une autorité territoriale compétente,
- Le lieu de détention ET les lieux de chasse aux appelants doivent être déclarés à la fédération départementale du lieu de détention chaque année.
C'est un environnement normé digne de 1984 qui succède presque sans prévenir à la douce anarchie qui régnait jusqu'à l'hiver dernier sur les élevages d'appelants et dont il est difficile d'évaluer les conséquences, mais dont on peut s'étonner qu'il ne concerne pas également les canards d'ornement.
Quoi qu'il en soit, les trois points listés ci-dessus m'inspirent quelques commentaires.
1) Sur l'interdiction de l'éjointage des oiseaux nés après le 1er Août 2006 :
- Ce mouvement de retour en arrière a une vertu essentielle en cela qu'il retire aux prinicpaux opposants de la chasse avec des appelants un argument de poids, celui de la cruauté supposée de l'éjointage. Exit donc les pinces à ongles et les flacons de bétadine... l'heure est au retour des ciseaux de couturière.
- En poussant la prospective un peu plus loin, on peut imaginer que cette mesure ira dans le sens d'un maintien des filets de confinement au dessus des parcs pour éviter les envols intempestifs de colverts laissés sur les mares de hutte. Rien de très intéressant ni de très discutable.
2) Sur la tenue d'un registre officiel du nombre et des espèces détenues :
- L'existence d'un registre dont les seules entrées possibles seront les noms scientifiques des espèces d'oies, de canards de surface et de canards plongeurs dont la chasse est autorisée, de la foulque macroule et du vanneau huppé sonne le glas de l'usage des hybrides. Aucune des autorités territoriales réputées compétentes dans le paraphe de ces listes déclaratives ne reconnaîtra l'existence d'une espèce désignée par ses ascendants : Anas platyrhynchos x Anas acuta et tant d'autres aimants à canards n'existent désormais plus du tout aux yeux de la loi.
- L'article 1, al.IV de cet arrêté contient enfin une contrainte de taille, celle de la fréquence d'actualisation et de déclaration du registre. Les cheptels d'oiseaux détenus varient en permanence, au gré des naissances, des échanges et des achats : faudra-t-il effectuer les démarches déclaratives à chaque entrée et chaque sortie d'oiseaux ? Si tel est le cas, les salles d'attente des commissariats et des préfectures deviendront des lieux de rencontre courrus des sauvaginiers.
- L'annexe qui décrit les informations nécessaires à la tenue des registres de déclaration est un modèle du genre qui rendra les échanges ou les ventes d'oiseaux particulièrement complexes. J'aurai l'occasion de revenir sur ce point dans une note spécifique.
3) Sur la publicité des listes d'appelants, des lieux de détention et des lieux de chasse.
- L'exigence édictée à l'article 2 de ce nouvel arrêté de déclarer auprès des fédérations les éléments suivants : nom, prénom et adresse du détenteur, lieu de détention des appelants, espèces et nombre d'appelants par espèce, lieu(x) de chasse aux appelants comprte un risque qui me tétanise, celui de rendre publique - tout du moins auprès d'autres chasseurs de gibier d'eau - l'adresse de mes parcs. Pour vivre heureux, vivons cachés, dit le dicton... j'ai eu la triste surprise de trouver un parc pillé cet hiver après avoir déclaré en mairie la liste des oiseaux que je détenais. J'ai du mal à imaginer que ce dispositif pavé de bonnes intention ne succite pas des vocations de voleurs.
- La décalration des lieux de chasse est une contrainte inacceptable en cela qu'elle crée des conditions d'infraction. Prenons un exemple simple : je chasse de manière régulière sur trois territoires - je peux aisément déclarer ces lieux au début de la saison de chasse -; mais il m'arrive d'être invité à hutter à la dernière minute dans d'autres départements et à y venir avec mes appelants. Que j'ose, et je serai hors la loi si je suis contrôlé sur la route...
Si cet arrêté ne me surprend pas et s'il contient même quelques bons points, je m'étonne cependant que la liste de contraintes qu'il impose ne permette pas de résoudre un problème majeur qui découlait directement du capharaüm ambiant, à savoir, celui du vol des oiseaux. Les registres détaillés sont tenus par les sauvaginiers mais ne sont en aucun cas centralisés auprès d'une autorité administrative ou bien auprès de la Fédération... les renards à deux pattes ont de beaux jours devant eux.
Vous pouvez consulter le texte intégral de cet arrêté en cliquant sur ce lien
Tous vos commentaires sont les bienvenus, bon courage et bonne chance,
Nicolas
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